Église verte

Ce colloque est né de la volonté de Danièle Ribier, ancienne présidente des Fraternités Charles de Foucauld, de continuer la réflexion sur l’encyclique. Connaissant bien Anne Doutriaux, du Mouvement Laudato Si’ (responsable France), c’est tout naturellement qu’elles ont organisé ce colloque ensemble, en y associant le diocèse de Corbeil-Evry via son service Écologie & Solidarités, Église verte et le lieu d’accueil, la maison franciscaine de la Clarté-Dieu, à Orsay dans l’Essonne.

Une centaine de personnes y ont participé : des membres des fraternités Charles de Foucauld, des animateurs paroissiaux Église verte, des animateurs Laudato Si’, des diocésains… Retrouvez dans cet article la première moitié des interventions, la deuxième partie se trouve ici.

Table ronde œcuménique d’ouverture : « Pourquoi ce sujet de l’écologie intégrale est-il important pour nous chrétiens ? »

Les participants et orateurs étaient invités à définir ce concept en un mot.

Pour Thierry Magnin, prêtre et co-président de la Catho de Lille, c’est « soin », de prendre soin. Pour Corinne Bitaud, chargée de mission écologie & justice climatique à l’Eglise protestante unie de France, c’est « lié », découverte spécifique à l’encyclique et pour Ivan Birr, prêtre orthodoxe et secrétaire général du label Église verte, c’est « laudato », louer, remercier Dieu pour ce qu’il nous donne.

Pourquoi ce sujet est-il important pour nous chrétiens ?

Corinne : « Car nous confessons tous que Dieu est un père créateur, qui se soucie de toutes ses créatures et a confié une responsabilité particulière à l’humain dans sa création. Nos vies affectent la Création, cela implique un changement immense de l’ordre de la conversion. Cela concerne les églises, elles ont un talent pour accompagner les conversions. Il y a un besoin de retourner aux sources bibliques, car puisque les problèmes climatiques et écologiques touchent en premier les plus faibles, les chrétiens doivent assumer un rôle prophétique, expliquer ce qui se passe. Il y a également besoin de s’engager dans nos vies quotidiennes, faire de l’agapè pratique, de la fraternité : tout cela, les églises connaissent. De plus, l’annonce du salut en Jésus-Christ doit se faire dans la réalité d’ici et d’aujourd’hui. Il y a également un travail de consolation à construire : dans ces angoisses, nous croyons en un Christ qui a traversé ces angoisses, qui a traversé et vaincu la mort, qui ne nous laisse pas seul : les églises peuvent mobiliser les thèmes de l’espérance et du pardon en lien avec la crise écologique. »

Ivan : « Les humains sont des créatures, liées à l’ensemble de la Création. Vouloir séparer les humains du reste de la création s’apparente à un schisme que nous devons réparer. Pour « dominer », il faut se faire les serviteurs de tous, comme le christ mais aujourd’hui, la nature qui devrait être source de louange devient source de prédation. »

Thierry : « les chrétiens doivent lier action et prière, une conversion ne se décrète pas d’en haut. Pour les catholiques, cela passe par un ancrage dans la doctrine sociale de l’Église, par exemple l’option préférentielle pour les pauvres. Basile de Césarée nous dit que Dieu a donné accès à l’homme à l’atelier de la création divine. Il l’a pris pour continuer cette création et agir sur elle, dans le cadre de l’alliance. Il lui a donné accès à son logos entechnos = parole industrieuse pour cela. »

Quelle figure vous inspire pour la conversion ?

Corinne : « Jonas : celui qui ne voulait pas y aller, mais qui l’a fait quand même. Il a réussi la conversion de Ninive en un jour. »

Thierry : « Charles de Foucauld, qui a vécu une conversion pas que du cœur mais de toute sa manière de vivre. Sa prière de l’abandon est une façon de se déposséder. Quand j’arrête de me sentir propriétaire, la conversion devient possible.

Ivan : « Le fils prodigue : il dissipe son héritage jusqu’à ce qu’il ressente la faim et retourne en lui-même, réfléchit à ce qu’il a fait. »

Pourquoi la conversion est-elle si difficile ?

Ivan : comme le disent les philosophes grecs, une habitude est une seconde nature, il est difficile de s’en défaire dans une société 100% tournée vers la consommation.

Thierry : les 6 témoins jeunes à la première Assemblée plénière des évêques sur l’écologie ont tous dit « sans souffle spirituel, on ne se met pas à l’action » : sans cela, difficile de se convertir.

Corinne : nous vivons dans des référentiels sur certains sujets, et il faut du temps pour que ça change (ex : il a fallu du temps avant d’accepter que la Terre tourne autour du soleil). Il nous faudra du temps pour se dire que non, ça n’est pas l’humain le sommet de la création, mais le sabbat. Certaines choses sont ancrées et intimes : je me souviens d’une discussion en petits groupes où un des participants était catégoriquement allergique au fait de manger moins de viande, car ses parents avaient travaillé dur pour lui permettre d’en manger chaque jour.

Comment parler de sujets écologiques sans jugement ?

Ivan : les moines ont inspiré la théologie écologique orthodoxe. Ce sont des personnes qui jeûnent, qui prennent soin de leur écosystème. Il n’y a pas de meilleur moyen pour amener les gens à prendre une autre voie que de leur montrer. L’importance des modèles, des exemples est à souligner : mon grand-père vivait dans une cabane sans technologie aucune au Chili, mais il était en contact épistolaire avec des nombreuses personnes qu’il a inspirées : 3 000 sont venues à son enterrement.

Corinne : Les prophètes montrent qu’une parole culpabilisante ne marche pas à court terme. Une piste intéressante serait de parler de sa culpabilité avant de parler de celle des autres, parler de péché pourrait aider à bouger en Église. Dans la théorie du changement des organisations, il faut une « burning platform », rien ne change s’il n’y a pas cette sensation-là.

Ancrage biblique dans l’Ancien Testament – Corinne Bitaud

Corinne suggère d’abord de ne pas trop projeter nos attentes écologiques sur le texte biblique, mais souligne que la crise écologique remet en cause certaines de nos conceptions fondées sur la Bible, des « théologèmes » qui orientent à notre insu notre façon de voir un problème (idée développée dans le dernier livre de Stéphane Lavignotte). Le fil de l’exposé reprend la trame du rapport synodal 2021 de l’EPUdF (« Écologie : quelle(s) conversion(s) ? »).

Place et rôle du monde naturel et sauvage dans l’Ancien Testament

Genèse 1 est une promesse à réaliser, pas un récit du passé. Dieu donne un espace et un temps pour le déploiement de la vie. La Bible a conservé des traces de la mythologie moyen-orientale, dans laquelle la création du monde est le résultat d’un combat de Dieu contre les forces du chaos. Dieu va ordonner pour créer, l’univers se structure suite à une parole de Dieu pour permettre l’éclosion de la vie.

« Soyez féconds et multipliez-vous » : cette multiplication de la vie répond à la demande de Dieu. La vie ne se reproduit pas, elle produit des êtres différents d’elle-même. L’intention de ce message est la bénédiction et l’optimisme, pas l’incitation à la surpopulation : le peuple juif a un avenir malgré l’exil. Nous ne sommes pas aujourd’hui déportés à Babylone comme les juifs à l’époque de la rédaction de la Genèse, mais nous sentons des menaces qui pèsent sur nous et ne savons pas si nous avons un avenir et certaines personnes ne souhaitent pas avoir d’enfants justement pour ces raisons.

Les rédacteurs de la Genèse indique que la lune et le soleil sont des luminaires, en rébellion contre les Babyloniens qui les vénèrent comme dieux. Ce qui était une rébellion contre Babylone a ensuite été reçu comme message de désacralisation de la nature, ou de séparation de l’homme et de la nature.

L’être humain image de Dieu dans son rapport au monde naturel et sauvage

L’Image de l’humain dans la Bible est à l’inverse de la mythologie babylonienne : il a des prérogatives royales et est associé au processus créateur par travail de la terre et nom des animaux, il n’est pas conçu pour nourrir Dieu par ses sacrifices.

L’être humain est créé le 6e jour en même temps que les bestiaux etc, il n’a pas son jour à lui. Il a cependant une place particulière : s’il n’est pas possible de mettre Dieu et l’humain sur le même plan (à l’époque Dieu est tout autre, on ne prononce même pas son nom), l’être humain est proche du divin, le jardin d’éden ressemble aux jardins royaux perses. Ces prérogatives royales sont évoquées dans le Psaume 8 mais à l’époque, il est impossible d’imaginer que l’humain puisse maîtriser la nature, elle est menaçante !

Ensuite, la prise de conscience des limites humaines pousse à établir des rapports de domination hommes/femmes mais cette intention ne figure pas dans le texte original (encore un théologème !). A l’origine, les fruits des arbres et les herbes sont la nourriture des êtres vivants qui cohabitent en paix, la violence humains/animaux est également exclue dans le jardin d’Eden.

Le verbe « cultiver » dans l’ordre de « cultiver et garder la terre » signifie aussi le service religieux. Également, le Seigneur prend lui-même soin de la Terre, il arrose la terre par exemple dans de nombreux passages bibliques. Nommer est une prérogative royale : Dieu fait de l’humain un partenaire pour l’accomplissement de la Création en nommant les animaux.

Le mal fait ensuite irruption, ce qui conduit finalement au déluge. Gn 6,5 : la méchanceté de l’homme se répandait sur la terre. L’humain est responsable d’un retour au chaos et le déluge s’achève uniquement par un renoncement inattendu de Dieu à sa toute-puissance, il fait alors alliance avec toute la Terre. Les conséquences de la violence humaine font que Dieu limite le pouvoir qu’il confie aux fils de Noé : ils peuvent manger les animaux et en seront craints, dans la limite de la règle du respect du sang. Les humains ne peuvent pas faire ce qu’ils veulent avec la vie, il se trouvent à la fois prédateurs et protecteurs. Attention, cette autorisation est contrebalancée par les visions du prophète Esaïe sur la création réconciliée.

La question des limites se pose très vite aux humains (« tu pourras manger de tout sauf de l’arbre de la connaissance, sinon tu mourras »). La vie pose elle-même des limites à la vie ! C’est la première évocation de la mort et des limites en même temps. L’effort technique pour gommer la « punition » divine est constant à travers l’histoire (dans la Bible, la ville est par exemple le symbole de la puissance que les hommes veulent acquérir), mais ce que Dieu veut peut-être pour nous, c’est de savoir gérer la frustration (cf la terre deviendra difficile à cultiver). D’ailleurs, « Dieu punit l’homme » est un théologème dont nous pourrions nous défaire ! Le prophète Jérémie nous dit à propos de la sécheresse : « La méchanceté des hommes retombe sur leur tête ».

Laudato Si’ dans la doctrine sociale de l’Église (catholique) – Hélène Noisette

Hélène nous rappelle d’abord que les questions écologiques ont leur place dans le magistère social avant Laudato Si’, même si elles ont été probablement trop timides et peu entendues. Le conseil œcuménique des églises (COE) a plus abordé les questions écologiques et produit de documents à ce sujet que l’église catholique. Dans les années 60/70, la question des pollutions est abordée par Paul VI, par exemple dans son discours à la FAO en 1970 : risque nucléaire en pleine guerre froide, inégalités Nord/Sud, pollutions diverses… Lors de la journée mondiale de la paix de 1990, Jean-Paul II évoque les problèmes écologiques (« exploitation désordonnée des ressources »), ils sont également mentionnés dans Caritas in Veritate de Benoît XVI.

L’encyclique Laudato Si’ mentionne l’écologie plutôt que l’environnement comme dans les textes précédents. Ce thème écologique intègre la question de la justice sociale dans la DSE.

Il s’agit d’une encyclique sociale, qui expose le double défi pour humanité : la situation écologique insoutenable et le contexte social dégradé. Nous pouvons mettre les limites planétaires (article explicatif) au regard des problèmes identifiés par le pape François : pollution/culture du déchet, question de l’eau, perte de biodiversité, tout cela dans un contexte de grandes inégalités mondiales où la surconsommation et le gaspillage côtoient des populations qui ne peuvent mener une vie digne. Cette articulation entre plancher social et plafond écologique s’incarne dans la théorie du donut de Kate Raworth, pour un espace juste et sûr pour que l’humanité se développe (article explicatif) . De même, les 17 Objectifs de Développement Durable adoptés en 2015 répondent à cet enjeu de ne pas dépasser le plafond et d’assurer le plancher pour tout le monde (LS 139).

Les plus pauvres sont les plus touchés, les plus vulnérables et les moins responsables des problèmes écologiques. Dans les pays du sud, les pauvres dépendent directement de la qualité des écosystèmes car ils sont agriculteurs, pêcheurs etc. Le concept de justice environnementale est né aux États-Unis, où les chercheurs et militants se sont rendus compte que comme les loyers étaient moins chers à côté de périphériques, d’usines etc…, seuls des pauvres y habitaient et subissaient les nuisances. Ils sont les plus vulnérables : lors de l’ouragan Katrina qui a touché la Nouvelle-Orléans, les précaires sont restés sur place car ils n’avaient pas de moyen de partir. Ailleurs, le Bangladesh risque de perdre 40% de ses terres agricoles d’ici à 2050 à cause de la salinisation liée à la montée des eaux, ce qui suscite des migrations internes (ex : les agriculteurs déplacés vont vivre dans les bidonvilles de la capitale pour y trouver un emploi informel) ou internationales. 216 millions personnes devraient migrer d’ici 2050 au Bangladesh si rien n’est fait. Enfin, les pauvres sont les moins responsables : les riches (pays et personnes) ont disproportionnément plus émis que les pauvres.

Au paragraphe 52, on trouve une mention intéressante de la dette financière (instrumentalisée pour contrôler les pays du Sud), mais les pays du Nord qui ont contracté une dette écologique envers les pays du Sud n’en sont pas du tout « prisonniers » de la même façon.

Laudato Si’ nous invite à changer nos modèles de pensée et paradigmes :

1) Sortir de l’anthropocentrisme déviant (LS 116, 89-91, 138-140). Le pape parle de famille universelle, de communion sublime de tous les vivants. L’humain comme seigneur de l’univers doit être un administrateur responsable : Jésus, le véritable maître et seigneur, lave les pieds, donc si l’humanité se veut réellement dominus sur la création, elle doit en laver les pieds ! Il est important de reconnaître la valeur propre des créatures, ce qui n’est pas un discours commun dans l’église catholique en Occident. La fin ultime des créatures, ça n’est pas nous, c’est Dieu (LS83).

2) Remettre en cause le paradigme technocratique et ses conséquences économiques. Le Pape dénonce la vision analytique et la tendance à la spécialisation et à la domination. Cette vision est utile pour résoudre certains problèmes, mais n’est pas la bonne pour penser les relations du vivant. Des critères techniques ont envahi le champ social, il y a un véritable risque que la technique devienne autonome et une fin en soi. Ce paradigme influence notre vision de l’économie, via la recherche du profit à court terme (incompatible avec vision long terme, nécessaire pour préserver le fonctionnement des écosystèmes). Aux paragraphes 106, 109 et 190, on trouve une critique de la croissance économique comme solution magique aux problèmes : on sait qu’il ne suffit pas que la richesse globale augmente pour qu’elle bénéficie vraiment aux plus pauvres.

Sortir de ces paradigmes doit se traduire concrètement :

  • Sortie du consumérisme (LS 203-204, 220, 223) : la conversion écologique passe par la gratitude, la sobriété, le partage… Comme nous sommes « drogués » à la consommation, il faudra plus que des injonctions pour s’en sortir, il y a un besoin de développer des imaginaires heureux et désirables, au-delà de la consommation.
  • La conversion doit aussi être civile et politique (LS 231), se manifester dans nos macro-relations. Cette dimension politique est difficile à aborder en Église, c’est quasiment un gros mot alors que Jean-Paul II écrivait que la politique est un lieu de sanctification, qu’elle est charité suprême.

Écologie & Solidarités dans le diocèse d’Évry – Mgr Pansard

L’Église, c’est nous quand ça nous arrange et une réalité extérieure quand ça nous arrange aussi ! Quand les chrétiens demandent, « que fait l’Église ? », je réponds : que faites-vous ?

Après Laudato Si’, j’ai eu l’intuition que plutôt que de créer un nouveau service diocésain de l’écologie, il était plus opportun de l’intégrer au service des solidarités. La difficulté est bien sûr de faire comprendre le lien entre question sociale et écologique. Le département de l’Essonne comptait à sa création, en 1966, 400 000 habitants et en compte désormais 1,3 million (dans 10 ans, ce sera 1,5 million). Le rapport au territoire a donc énormément changé, de simples villages sont devenus des villes, avec une forte densification. D’un bout à l’autre du diocèse, on trouve aussi bien des univers de béton que de forêts, des différences sociales entre surdiplômés de Saclay et population défavorisées des Ulis. La population du département est très jeune… mais ceux qui viennent à la messe ne le sont pas ! Je vois beaucoup de paroissiens noirs à la messe à la cathédrale… mais pas ici, au colloque ! Le département compte aussi 42 cités populaires, où la question de la surconsommation ne se pose pas, car les personnes sont à découvert le 20 du mois. Dans la pédagogie sur les enjeux environnementaux, il est crucial de prendre en compte la gravité de la situation sociale. Que signifie « sobriété heureuse » pour ceux qui n’arrivent pas à avoir le minimum ?

Pour les vieilles générations, il faut également faire attention à ne pas se présenter en donneurs de leçon à une génération plus jeune qui nous en veux. Les jeunes des cités, eux, n’ont pas d’expérience de marche, de camper (« ils ont la trouille au Frat ! »), que le silence n’est pas vide… mais ils aiment leur quartier et s’y engagent. En matière d’écologie, poursuivons les expériences et faisons se rencontrer les univers, ville et campagne, riches et pauvres…

En quoi la figure du Christ peut-elle nous éclairer ? Thierry Magnin

Faire un parcours de Christologie (déceler les figures du Christ dans Laudato Si’) est un chemin de conversion ! Le Pape fait des liens entre figure du Christ et conversion écologique. Après le constat scientifique, l’encyclique s’enracine dans l’Ecriture. Ces figures du Christ sont intimement liées et sont à recevoir dans notre propre relation au Christ, dans la complexité, dans le mystère pascal, centre de notre foi chrétienne, qui suppose le passage par des morts, par l’acceptation des limites humaines et des ressources, par la mort de fantasmes de toute-puissance. Le Christ de nature divine a épousé la condition humaine, il est entré dans les limites de l’existence.

Le Christ verbe de Dieu créateur

Christ est verbe de Dieu fait chair dans notre condition humaine. Dans le prologue de Jean : par lui tout a été fait, cela signifie que toute la Création est en relation au Christ. Le Pape invite les croyants à reconnaître à travers cette parole créatrice la présence de Dieu dans chaque créature, donc le respect de la dignité de toute vie (animale et végétale). La Trinité est créatrice (idem, cf prologue de Jean). Dieu n’est pas un fabricant, il donne l’existence à tout moment et ensuite leur autonomie aux créatures. On lit dans l’épître aux Colossiens : tout a été créé par lui et pour lui. Le Christ verbe créateur est associé à la sagesse divine : dans les Proverbes, la sagesse est avec Dieu dès le commencement, or Jésus est sagesse incarnée (1 Corinthiens 24, 30).

Le Christ est le maître de toute la création, il en est l’origine et le but ultime, l’alpha et l’oméga. La création est emplie de mystère et de beauté : en le considérant comme créateur, nous sommes invités à contempler la sagesse et la bonté de Dieu et du Christ à travers la biodiversité. Le Pape met en garde contre une vision utilitariste de la Création. En se référant au Christ créateur, le pape souligne la responsabilité humaine (cultiver et garder). Si je ne reconnais pas qu’il y a un don de Dieu, je ne vais pas entrer dans la gratitude.

Le Christ rédempteur et sauveur

La rédemption apportée par la Pâque du Christ s’étend à toute la création. Notre relation avec Dieu doit être réconciliée avec notre relation avec la Création. La rédemption comprend la guérison de la relation humanité-création, elle signifie restauration de ce qui a été blessé et corrompu dans nos relations (Dieu, autres, création, soi-même). Le Christ offre une possibilité nouvelle de relation. Les problèmes écologiques viennent d’une vision erronée de la relation humanité-création, cette rupture de la relation est une question morale, car elle affecte de façon disproportionnée pauvres et générations futures. Il nous faut renoncer à notre vision consumériste (si on en a les moyens de consommer). En embrassant la figure du Christ rédempteur, nous sommes appelés à vivre une nouvelle forme de responsabilité.

Le Christ pauvre

Il entre dans notre condition humaine. Pape souligne qu’exploitation nature et plus vulnérables va de pair. Figure du christ pauvre met en lumière lien étroit crise écolo et justice sociale, responsabilité envers plus pauvres et démunis. Personnes vivant dans la pauvreté sont les premières à nous appeler à responsabilité et solidarité, elles nous font prendre conscience de nos propres pauvretés et vulnérabilités. Jésus a manifesté une préférence pour les pauvres, en se tournant vers eux avec compassion, amour et sens de l’égalité. Agir pour réduire les inégalités est une manière de vivre la figure du Christ pauvre, qui récapitule celle des plus vulnérables.

Le Christ serviteur

Jésus est servant de l’humanité, prenant soin de tous. En suivant son exemple, la domination de l’être humain sur le reste de la Création doit être exercée dans un esprit de service. Servir l’humanité en prenant soin de la création avec humilité, c’est abandonner l’égoïsme dans notre relation avec la Création et les autres. Jésus a pris lui-même la forme de serviteur lavant les pieds des disciples. Christ serviteur et salut vont ensemble. Cette attitude de service désintéressé peut être un appel à la conversion écologique. Si nous entrons dans ce sens du service, nous pouvons aussi entrer dans la compassion et d’autres vertus, car le chemin du service, c’est le chemin de la vie.

Le Christ cosmique

Dans Paul & Jean, on lit : Christ en tout, en tous, en toute la Création. Il récapitule toute la Création. La vision du Christ cosmique de Teilhard de Chardin reprend cette vision récapitulative, tout est lié dans le Cosmos par le Christ incarné au cœur du moindre atome. Cette perspective souligne l’interconnexion et l’interdépendance de la Création en celui qui la récapitule. Le pape souligne que la préoccupation écologique partagée par tous les humains appelle à un dialogue global, interreligieux… manière d’entrer dans le Christ cosmique.

Retrouvez la suite des interventions dans notre deuxième article.


Notes prises par J. Maupas (attention, elles peuvent être faillibles)

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